Une semaine, presque jour pour jour après les tueries de Paris, la Belgique vient de frapper un coup sévère contre les filières djihadistes: jeudi soir, une douzaine d'opérations de police ont été lancées pour l'essentiel à Verviers et à Bruxelles. Bilan, deux morts du côté terroriste et treize arrestations. Trois des suspects ont été placés en détention et deux autres, bien qu'inculpés, ont été laissés en liberté et placés sous contrôle judiciaire. L'opération a permis de démanteler une cellule terroriste o
pérationnelle et son réseau logistique. Depuis, deux autre suspects ont été arrêtés en France, alors qu'ils s'apprêtaient à passer en Italie et leur extradition sera demandée par Bruxelles. Contrairement à ce que l'on pouvait penser et aux rumeurs qui couraient jeudi soir, cette opération n'a rien à voir avec les attentats de Paris: l'enquête était en cours depuis plusieurs mois et s'était accélérée depuis quelques semaines. Si la police a décidé de passer à l'action jeudi, c'est qu'un renseignement précis recueilli in extremis par des"moyens spéciaux" dans le détail desquels il n'est pas nécessaire d'entrer ici, ont révélé que le passage à l'acte était "imminent": "Une question d'heures", nous dit-on, ce qui permet de penser que des attentats auraient eu lieu dès vendredi matin. Le réseau ciblait essentiellement, mais pas seulement, la police. Un choix qui n'a rien d'étonnant puisqu'il a été déjà été remarqué au Canada, à New-York ou en France: la police est, avec l'armée l'un des symboles les plus visibles de l'autorité de l'Etat et nombre de djihadistes ayant un passé criminel ont des raisons personnelles d'en vouloir aux hommes et aux femmes en bleu. La menace immédiate a donc été écartée. Cela ne signifie évidemment pas qu'il faut baisser la garde.... Le gouvernement, en place depuis à peine quelques mois et qui a fait du renforcement de la sécurité l'un de ses chevaux de bataille a d'ailleurs annoncé un plan en douze mesures destiné à améliorer la lutte contre le terrorisme. O Création d'une nouvelle infraction terroriste relative au déplacement à l'étranger à des fins terroristes O Élargissement de la liste des délits permettant l'utilisation des "méthodes particulières de recherche" (écoutes téléphoniques, "sonorosation" de lieux privés "conspiratifs", etc.): l'incitation au terrorisme, le recrutement, les déplacement à l'étranger à des fins terroristes permettront désormais l'emploi de ces méthodes. O Élargissement des possibilités de retrait de la nationalité (uniquement, bien entendu, pour les doubles-nationaux). O Retrait temporaire de carte d'identité, refus de délivrance et de retrait de passeport pour les personnes présentant un risque pour l'ordre public et la sécurité et suspectés, par exemple, de vouloir se rendre à l'étranger à des fins terroristes. O Possibilité de gel des avoirs nationaux liés au financement du terrorisme. O Révision de la circulaire "Foreign Fighters" du 25 septembre 2014, simplification des structures actuelles et répartition plus claire des tâches entre les services, mise au point de procédures systématiques. O Optimisation de l'échange d'information entre les autorités et services administratifs et judiciaires. O Révision du Plan R (Radicalisme): La révision du plan de 2005 contre la radicalisation sera menée afin de prendre en compte les évolutions récentes. O Lutte contre la radicalisation dans les prisons: mise en place des moyens d'une meilleure détection des détenus radicalisés, isolement et concentration des détenus pour terrorisme dans deux prisons (une au sud du pays, l'autre au nord) afin d'éviter "l'infection" des détenus de droit commun. O Réforme des structures du renseignement et de la sécurité. O Mise à disposition d'effectifs militaires pour appuyer le travail de sécurité publique de la police autour de certains objectifs potentiels des terroristes (comme c'est déjà le cas en France dans le cadre de "Vigipirate"). O Renforcement de la capacité d'analyse de la Sûreté de l'Etat. C'est beaucoup, mais ce n'est qu'un début. Le député MR Denis Ducarme, par exemple, déposera prochainement un projet de loi visant à ce que les juges puissent prononcer une peine complémentaire pour tout condamné pour terrorisme en l'obligeant à porter, pour un nombre d'années déterminé, un bracelet électronique après sa libération. Les lois et réglementations qui naîtront de cette réforme en profondeur n'ont rien de "liberticide", elles sont, au contraire, le prix à payer pour protéger la vie des citoyens, la sécurité publique et l'ordre constitutionnel de la Belgique. Reste que la Belgique n'est pas une île et qu'il faudra également renforcer la coopération internationale entre pays européens mais aussi avec les Etats-Unis, les autres pays occidentaux et, bien entendu, les pays musulmans. Et reste également qu'il faudra bien, à un moment ou un autre, prendre les mesures qui s'imposent (c'est à dire, probablement, une offensive au sol) pour tenter d'éradiquer l'Etat Islamique et son califat fantoche qui représentent, aujourd'hui, la plus grave menace sécuritaire qu'ait connu le monde libre depuis des dizaines d'années. Mais il faut également être prêt à subir de nouveaux attentats: ceux-ci ne pourront jamais être totalement évités car, en ce domaine comme dans d'autres, l'assurance 100% n'existe pas....