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Les failles de sécurité à l’aéroport de Bruxelles étaient nombreuses et connues


Il est impossible d’affirmer que l’attentat qui a frappé, le 22 mars, l’aéroport de Bruxelles –National (« de Zaventem », du nom de la commune sur le territoire de laquelle il est implanté), aurait pu être évité.

Mais on peut avoir deux certitudes :

1) Daech, depuis 2014, a essentiellement tenté de frapper, en Occident des cibles faciles (« soft targets »), à savoir des lieux peu protégés et attirant la foule : les attentats du 13 novembre à Paris et l’attentat du métro Maelbeek à Bruxelles le 22 mars en sont des exemples évidents. Or un aéroport n’est pas ou, au moins, ne devrait pas être une « soft target ».

2) Les failles de sécurité à l’aéroport ne sont pas nouvelles et ont déjà été constatées à de nombreuses reprises reprises.

C’est sur ce dernier point que nous nous arrêterons aujourd’hui.

* Les infrastructures

> Il y a d’abord l’architecture de l’aéroport. Celui-ci a été construit il y a plusieurs décennies et, même s’il a été considérablement rénové ces dernières années, il n’en reste pas moins que l’étanchéité des zones « réservées » (zones sous douane, sous-sols, accès aux pistes, etc. Laisse très sérieusement à désirer. Les syndicats de police, dans une lettre ouverte envoyée à l’autorité évoquent une infrastructure « abominable » et « 4 niveaux des bâtiments » accessibles à tout un chacun y compris des criminels

> Nous ne prendrons qu’un exemple. Fin octobre 2015, nous partions en groupe, de cet aéroport pour une mission d’ESISC en Azerbaïdjan lorsque l’un d’entre nous a pris « le mauvais ascenseur » (non protégé et accessible à tous…) et s’est retrouvé… sur les pistes. Certes, sa présence a été immédiatement détectée et les services de sécurité sont intervenus avec diligence, mais cette anecdote en dit long sur la sécurisation de l’infrastructure….

* Les liens de certains membres du personnel avec des milieux criminels

> Des personnes ayant un passé judiciaire chargé sont employées à des tâches d’exécutions peu qualifiées (bagagistes, agents d’entretien) sur le site de l’aéroport, certains d’entre eux ayant accès aux zones (dites) sécurisées telles que les installations de tri et les pistes. Ceci a été confirmé ce 31 mars par Vincent Gilles, président du SLFP Police (syndicat libéral des services de sécurité) : une « grande partie » des employés au tri des bagages aurait « un passé judiciaire pour des faits criminels graves ».

> A 6 reprises, des braquages audacieux se sont produits sur le site de l’aéroport :

o Le 18 février 2013, une équipe de huit hommes lourdement armés circulant à bord de deux véhicules forçait le grillage de « protection » des pistes et attaquait un avion de Swissair en train de décharger : 120 colis contenant des diamants pour un montant de 37,5 millions d’Euros étaient volés.

o Le 2 avril 2001, c’est le sang-froid d’un chauffeur de fourgon qui lui permet d’échapper à une attaque.

o Le 31 octobre 2000 un fourgon de la Brink’s est braqué alors que des diamants sont transférés dans un Airbus de Lufthansa pour Francfort (butin : 6,5 millions d’Euros)

o Le 4 mai 1999, le braquage d’un fourgon de la Brink’s Ziegler en train de charger des caisses de billets de banque dans un avion de Virgin rapportait 1,8 millions d’Euros à ses auteurs

o Le 17 février 1999, quatre hommes habillés en employés de la Sabena dérobent l’équivalent de 1,8 millions d’Euros qui doivent chargés dans un vol de Virgin.

o Le 3 octobre 1995 le braquage d’un avion de la Swissair procurait un butin de 1,125 millions d’Euros à ses auteurs

Dans l’ensemble de ces six cas, il est évident que les braqueurs ont bénéficié de complicités intérieures: comment connaître, sinon, les horaires de transfert, les vols et fourgons concernés, et bien entendu les portes d’embarquement à cibler, sachant que Zaventem en compte plusieurs dizaines.

Dans certains de ces cas, ces complicités ont été identifiées, dans d’autres non. Or on sait que Daech, en Europe, a réussi une sorte de symbiose entre les milieux djihadistes « traditionnels » et les milieux de « l’islamo-gangstérisme »…

Tous aussi inquiétant : à chaque fois, les malfrats ont pu circuler sur les pistes sans être repérés et interceptés puis quitter les lieux comme ils y étaient entrés.

* La radicalisation de certains membres du personnel

> Plusieurs incidents ont eu lieu ces dernières années qui démontrent la radicalisation de certains membres du personnel d’exécution.

o A deux reprises au moins des passagers en provenance d’Israël ont eu la très désagréable surprise de découvrir des tags antisémites sur leurs bagages. Ceci démontre la présence d’éléments radicaux dans les soutes de l’aéroport mais également le fait que leur comportement est toléré par leurs collègues (pas de dénonciation de ces faits qui ne peuvent être ignorés de ceux qui côtoient leurs auteurs).

o La commission de tels faits ne peut s’expliquer que par un manque de contrôle de sécurité dans des zones sensibles.

o Vincent Gilles, à nouveau, fait état du fait que « dans le personnel bagagiste, il y a pas mal de personnes qui ont acclamé les attentats de Paris ».

o Il nous revient d’autres sources qu’au moins une quinzaine de bagagistes auraient rejoint (ou auraient tenté de rejoindre) les rangs de Daech en Syrie.

o Pour Vincent Gilles, la direction de l’aéroport et l’actionnariat se désintéressent de cette problématique, probablement par crainte de créer un conflit social.

o Selon la presse belge, « au moins 50 sympathisants de l’Etat Islamique » travaillent à l’aéroport et possèdent une habilitation de sécurité et un badge leur permettant d’accéder à toutes les installations y compris aux pistes mais aussi aux soutes et aux cockpits des appareils….

En conclusion :

Il est évident que ces éléments n’ont rien à voir avec l’attaque du 22 mars qui a été perpétrée depuis l’extérieur par des terroristes se faisant passer pour des voyageurs. Il est tout aussi clair que cette situation, véritable « recette pour une catastrophe annoncée » ne peut plus être tolérée.

Pour rétablir la confiance du public, il va de soi que la direction de l’aéroport de la capitale de l’Europe ne peut faitre moins, à l’avenir, que d’adopter la « tolérance zéro ».

En d’autres termes :

> Toute personne possédant un casier judiciaire (au moins pour des faits de violence) doit se voir retirer, sans délai, les badges et possibilités d’accès aux zones sensibles

> Aucune manifestation de radicalisme ne peut plus être tolérée

> Les personnels de l’aéroport doivent faire l’objet de contrôles réguliers, comme c’est le cas en France ou des dizaines de badges d’accès ont été retirés à des « radicaux » depuis des années.

Alors que l’on nous répète que l’Europe, et singulièrement la France et la Belgique sont « en guerre » il est temps que les responsables d’infrastructures vitales ou sensibles adoptent une véritable culture de la sécurité et se montrent proactifs.

Publié sur www.esisc.org

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