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1er février 1979: L’ayatollah Khomeiny rentre en Iran


Le 1er février 1979 restera à jamais une date noire dans l’histoire de l’Iran.

C’est ce jour là que Rouhollah Khomeini rentre de son exil français. Après un accueil triomphal à Téhéran, il va, en quelques jours, confisquer la révolution iranienne qui a commencé deux ans plus tôt et jeter les bases de la création de la République islamique d’Iran.

Depuis quelques années, le Shah était contesté, d’abord par quelques intellectuels, puis par la bourgeoisie libérale. Après avoir échoué dans ses tentatives de réformes politiques et sociales qui donneront lieu à la « Révolution Blanche » qui vise à moderniser le pays, Mohammad Reza Shah Pahlavi s’était enfermé dans un pouvoir de plus en plus autoritaire et solitaire, s’appuyant de plus en plus sur l’armée et sur la police secrète, la Savak.

Le 19 juin 1977, son principal "concurrent", le philosophe Ali Sharîatî meurt, dans des circonstances étranges, à Londres où il s’était exilé. Son décès fait de Khomeini, qui vit à Neauphle-le-Château et a rassemblé autour de lui une véritable cour, le principal dirigeant des islamistes, le courant le plus structuré de l’opposition. Celle-ci est en effet divisée en plusieurs factions qui n’arriveront jamais à s’entendre : les libéraux laïcs de Mehdi Bazargan, les religieux modérés, les marxistes du parti communiste Toudeh, les Moudjahidines du Peuple (qui mènent une forme de guérilla urbaine) et les islamistes radicaux, qui suivent la « ligne de l’Imam » (Khomeini). Acheminés depuis Paris et reproduits sur des milliers de cassettes audio diffusées à, l’heure des prêches du vendredi, les discours de ce dernier galvanisent une frange de la jeunesse et la partie la plus pauvre (et la plus religieuse) de la population.

A partir de janvier 1978, c’est l’escalade. Les manifestations se multiplient et la police fait usage de ses armes, semant la mort et radicalisant la contestation. Ainsi, le 18 février, à Tabriz, plus d’une centaine de contestataires seront tués. A compter du mois de mars, les émeutes deviennent à peu près quotidiennes. Hôtels de luxe et symboles du régime ou de la présence étrangère sont pris d’assaut ou incendiés. A la fin de l’été, la situation est hors de contrôle et le Shah décrète l’état d’urgence et décide que l’armée remplacera la police dans le face-à-face avec les manifestants. Le 7 septembre, c’est le « Vendredi noir » : on compte, à nouveau, des dizaines de morts, essentiellement des étudiants des écoles religieuses. En décembre, Shapour Bakhtiar, récemment nommé Premier ministre, arrive à convaincre le Shah de quitter le pays, le 16 janvier 1979. Aussitôt le souverain parti, Bakhtiar dissout la Savak et libère les prisonniers politiques. Mais il est trop, tard.

Le 1er février, donc, Khomeini – avec lequel Bakhtiar a vainement négocié pendant 15 jours – arrive à Téhéran, où il est accueilli par une foule que la BBC estimera à cinq millions de personnes. Suit un bras de fer de dix jours : bien que n’ayant aucun pouvoir ni titre légal, Khomeini a nommé un gouvernement « révolutionnaire » dirigé par le libéral Mehdi Bazargan. En mai, les cellules révolutionnaires, transformées en « comités locaux », se fondent dans les Gardiens de la révolution, qui deviennent la garde prétorienne du nouveau régime et assument la réalité du pouvoir, des tribunaux révolutionnaires voient le jour et des milliers de »partisans » du Shah sont sommairement exécutés après des simulacres de procès. Mehdi Bazargan perd du terrain et n’arrive pas à imposer la Constitution libérale dont il rêvait depuis des années. En son lieu et place est adoptée un texte qui créé la république islamique et fait de Khomeini, son Guide suprême, ayant le dernier mot en toutes matières.

En novembre, la situation s’aggrave encore avec le début de la crise des otages de l’ambassade américaine qui durera 440 jours. Bazargan démissionne immédiatement. Khomeini a triomphé. La république islamique, quarante ans plus tard, est toujours debout (même si elle est fortement contestée à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières) et demeure l’une des principales forces de déstabilisation du Moyen-Orient.

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