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Deux ou trois vérités bonnes à rappeler en cette époque où l’on déboulonne les statues


Deux ou trois vérités bonnes à rappeler en cette époque où l’on déboulonne les statues

Nous assistons, depuis trois semaines, à un spectacle terrifiant mais qui n’a, pourtant, rien pour surprendre : le détournement de la cause anti-raciste par l’extrême gauche, largement appuyée par une frange islamiste politique. Un détournement qui s’accompagne de la réécriture (par des incultes) de l’histoire européenne – et singulièrement de son versant colonial – mais aussi de la mise en cause d’un soi-disant « racisme systémique » européen et qui est agrémenté (si l’on peut dire) par les indignations sélectives de certains.


Tout commence, bien entendu, par la mort de George Floyd. Ce meurtre (car c'en est un…) est-il uniquement raciste ou est-il le tragique résultat de la combinaison du racisme, des pulsions violentes d’un officier de police dont la carrière avait déjà été entachée de plusieurs incidents graves, de la médiocrité de la formation de nombreuses polices locales américaines, d’une culture de la violence qui établit une différence majeure entre les Etats-Unis et l’Europe et de la déficience de l’encadrement de ce corps de police ? L’enquête le dira peut-être. Mais ce n’est pas mon sujet : ma préoccupation, c’est l’exploitation qui est faite de ce drame par des milieux qui y voient l’occasion de hurler fort et clair leur haine de l’Occident. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : de la mise au pilori de ce modèle civilisationnel occidental dans la détestation duquel se retrouvent gauchistes et partisans de l’islam politique.


D’abord, il y a ce procès fait à l’Amérique pour son racisme « endémique ». Personne ne niera qu’il existe toujours, dans ce pays, un « problème noir » mais peut-on vraiment parler de racisme « endémique » dans la nation qui a porté à, sa tête et non pas une seule fois mais pour deux mandats consécutifs, Barack Obama ? Peut-on dire sérieusement qu’il existe un racisme d’Etat dans un pays où des mesures (d’ailleurs discutables pour certaines d’entre elles, comme la « discrimination positive dans les écoles et universités) ont été mises en place depuis des décennies. ? Ces choix ont permis l’émergence d’une classe moyenne et d’une classe moyenne supérieure afro-américaine, particulièrement visible dans les médias, dans la culture ou dans le monde politique mais également, bien entendu, dans les professions libérales et dans l’administration. Un président républicain, Georges W. Bush, n’a-t-il pas eu une Conseillère à la sécurité nationale (Condoleezza Rice) et un Secrétaire d’Etat (Colin Powell) issus de la communauté afro-américaine ?

Ensuite, il y a eu l’importation en Europe des tensions nées de l’autre côté de l’Atlantique. Chez nous, le mouvement a pris deux aspects : les attaques contre une police jugée « raciste » et la remise en cause du passé colonial des puissances européennes.

Prétendre qu’il existe, en Europe, en 2020, un racisme systémique, c’est-à-dire un racisme d’Etat (ou encouragé par l’Etat, ou au minimum toléré par l’Etat) est évidemment absurde.


L’histoire des Etats-Unis et celle de l’Europe sont différentes : il n’y a pas eu en Europe (en tout cas sur le continent européen, la situation, par exemple dans les Antilles françaises, était différente jusqu’au milieu du 19ème siècle) d’importation d’une main d’œuvre esclave venue d’Afrique. Les minorités ethniques présentes dans l’Union européennes sont, majoritairement, soit issues de nos anciennes colonies soit d’immigration plus récente.


La vie d’un immigré en Europe est-elle un long fleuve tranquille ? Non, bien entendu, mais la situation de minorité n’est jamais extrêmement confortable. Et elle ne tient pas toujours à la « race » : au Royaume-Uni, les catholiques irlandais (pourtant blancs) auraient bien des raisons d’en vouloir aux Anglais (tout aussi blancs), en Belgique on ne peut pas dire que les Flamands aient été extrêmement bien traités par la bourgeoisie francophone entre l’indépendance (en 1830) et la Seconde guerre mondiale ; en France, Bretons, Occitans ou Basques n’ont pas entretenu que des rapports idylliques avec un Etat jacobin (donc centralisé) largement dominé par une « élite » parisienne.


Mais nous avons tenté de dépasser ces clivages, de rétablir une égalité des chances et, certainement, des droits, et même quand c’était possible de protéger les cultures minoritaires. Cela a été long, cela a été difficile, cela a été parfois douloureux, mais cela s’est fait.


La même évolution a eu lieu en ce qui concerne les minorités allochtones. Depuis cinquante, des combats ont été menés, et des résultats ont été acquis au nom d’une idée simple : tous les hommes et toutes les femmes se valent, tous ont les mêmes droits et doivent bénéficier, autant que faire se peut, des mêmes chances.


Or aujourd’hui, l’extrême gauche va à l’encontre de cet idéal : l’idée de la « racialisation », de l’affirmation parfois agressive de la différence et du fait qu’en définitive, les « noirs » et les « minorités ethniques » ne peuvent pas se mêler aux « blancs » supposés privilégiés - conduit à, la division (tout comme cette autre idée de séparer les gens par « genre », comme on l’a vu, par exemple, ces dernières années dans les AG de mouvements étudiants en France). Ne nous trompons pas : cette attitude nous amène à une nouvelle ségrégation, au communautarisme et à la haine.


L’un des aspects les plus consternants de ce qui se déroule depuis trois semaines est la remise en cause de l’histoire européenne, et, singulièrement, de la colonisation.

Certes, on peut considérer que cette colonisation n’a été qu’une longue suite de crimes. Mais ce serait faux et réducteur. Bien entendu l’idée maîtresse de l’impérialisme européen (j’emploie cette expression dans son sens historique de volonté d’expansion et non dans ses acceptions politique ou péjorative) était d’exploiter les richesses locales (bois et bois précieux, minerais, produits agricoles, etc.) Mais, qu’on le veuille ou non, et malgré de grosses différences entre puissances coloniales dans le modèle de développement qui était imposé, il y a eu, aussi, des côtés positifs à cette « expérience » : l’éradication des maladies et la mise en place de systèmes de santé, la mise en valeur des richesses naturelles et, bien entendu (au moins dans le cas de la France et du Royaume-Uni, moins dans celui de la Belgique) l’éducation, qui a permis de faire et de développer des élites « indigènes » comme on disait à l’époque.


Et non, soyons clairs, la colonisation européenne n’a pas été « esclavagiste » : que du contraire ; elle a lutté contre les trafics d’esclaves qui profitaient à des chefs de tribus africains qui vendaient à des trafiquants arabes les enfants de leurs ennemis personnels ou ceux qui ne pouvaient compter sur aucune protection parce qu’ils appartenaient à une ethnie rivale ou aux plus basses « classes » de leur propre groupe. L’Europe a non seulement été le premier continent (et, longtemps, le seul) à renoncer à l’esclavage mais aussi à le combattre. Les armes à la main, quand il le fallait.


Nous, Européens, serions donc esclavagistes et racistes… Et pourtant !


Si l’on s’en tient uniquement à la France, peut-on vraiment ignorer un Félix Eboué (1884-1944), né à Cayenne, dans une famille pauvre de « nouveaux libres » (c’est-à-dire d’anciens esclaves émancipés par la loi de 1848), auxquelles une bourse permit de venir étudier à Bordeaux puis d’obtenir (en 1908 !) une licence en droit qui en fit un « administrateur colonial » à la brillante carrière ? Et comment passer sous silence qu’il fut, en juin 1940, l’un des premiers partisans du générale de Gaulle ce qui lui valu d’être « compagnon de la libération ». Comment ne pas se rappeler que le Prix Goncourt 1921, René Maran (premier Français noir à recevoir cette distinction) fut récompensé pour un roman dénonçant…le colonialisme ? Et que dire de l’Ivoirien Félix Houphouët-Boigny qui fut plusieurs fois ministre à Paris avant de devenir président de son pays à la décolonisation ? Ou du Sénégalais Léopold Sédar Senghor qui lui aussi fut ministre français (et premier Africain à siéger à l’Académie française) avant de présider aux destinées du Sénégal ? Ou de Gaston Monnerville, petit-fils d’esclave guyanais qui fut président du Sénat de 1947 à 1968 ?


Et si l’on veut remonter plus loin, rappelons-nous Thomas Alexandre Davy de La Pailleterie, premier général afro-antillais de l’armée française (sous le Premier empire) dont le fils n’est autre que l’immense Alexandre Dumas ?

Tout cela, bien entendu, laisse indifférents les « Antifa », « décoloniaux », « racialisés » ou autres « indigénistes » qui, depuis trois semaines déboulonnent ou vandalisent toutes les statues rappelant notre passé qu’ils peuvent trouver, de Bruxelles à Londres en passant par Paris. Personne ne trouve grâce à leurs yeux, de Léopold II à Winston Churchill, Charles de Gaulle ou au Mahatma Gandhi.


Voir de jeunes imbéciles s’en prendre au nom de l’antifascisme et de l’anticolonialisme aux représentations des deux chefs qui furent seuls à défier Hitler et le nazisme en 1940 et du père de l’indépendance de l’Inde ferait hurler de rire si cette révélation de leur abyssale stupidité et les énormes lacunes de notre enseignement dont on peut donc sortir en ignorant tout du passé de son pays n’était pas triste à en pleurer.


Le pire, bien entendu, est l’attitude des « élites » qui, loin de remplir le rôle qui devrait être le leur (informer, éduquer, corriger) attisent les braises ou tentent de prendre le vent. Ainsi, dans les médias, se multiplient, ces jours-ci, les débats et reportages sur les « violences policières » ou le « privilège blanc » (??) et, à Bruxelles capitale de l’Europe, il s’est trouvé une commune (Etterbeek, qui abrite une partie des institutions européennes) pour débaptiser une dizaine de rues portant des noms pouvant être liés au passé colonial de la Belgique. Une telle stupidité laisse pantois.


Lénine avait une expression pour désigner les capitalistes qui lui facilitaient la tâche : il parlait des « idiots utiles » tellement bêtes qu’ils finiraient par lui vendre la corde qui servirait à les pendre.


Car c’est bien de cela qu’il s’agit : ceux qui tentent de réécrire notre passé et s’en prennent à notre patrimoine sont mus par la haine : haine de l’Europe, haine de notre mode de vie, haine de nos valeurs humanistes et libérales. Ce qu’ils veulent, c’est détruire notre système.


Comment expliquer, sinon, leur cécité devant la réalité et leurs indignations sélectives ?

Car où étaient-ils, en 1994, lorsque les Hutus ont massacré, en trois mois, 1 000 000 de Tutsis ? Je ne me souviens d’aucune protestation dans nos rues.

Que faisaient-ils, tous ces esprits généreux, lorsque Daech, en Syrie et en Irak, rétablissait l’esclavage, y compris l’esclavage sexuel des femmes et des enfants non-musulmans ? Je ne me rappelle pas les avoir vu manifester.


Où sont-ils, aujourd’hui, pour dénoncer l’esclavage qui, effectivement existe encore de nos jours ? Evidemment, ce n’est pas en Europe, mais en Mauritanie, où 50 000 « Haratines » («Noirs des Oasis ») « appartiennent » à des « Maures » ou en Lybie où existent de véritables « marchés d’esclaves » subsahariens ? Je ne les entends pas crier leur indignation.


Et que font-ils quand, en Europe, on assassine des Juifs au seul fait de leur judéité ? Je ne perçois aucun écho de leur indignation. Mais ce que j’entends bien, en revanche, ce sont ces cris de « sale juif ! » dans les manifestations de ces derniers jours.


Il est temps de reprendre nos esprits et de nous dresser pour défendre notre histoire (ce qui veut dire aussi, bien entendu, assumer les fautes de nos pères et de nos contemporains quand elles sont avérées) et de nous faire respecter.


En 2020, il n’y a pas que le Covid-19 qui tue : l’imbécillité, l’ignorance, la manipulation et la lâcheté sont également des virus mortels.

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