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Israël: Les otages ne sont pas une priorité, éradiquer le Hamas, si!


D’un côté, les otages – entre cent et deux cents, on ne sait pas exactement – de l’autre un intérêt national, une forte nécessité : éradiquer le Hamas ou, au moins, lui administrer une leçon telle qu’il perdra (pour un certain temps) ses capacité opérationnelles. L’équation parle d’elle-même, et son résultat est tragique : les otages ne sont pas une priorité. Israël n’a pas le choix.


Sur plusieurs chaines d’informations européennes les commentateurs et autres chroniqueurs continuent à spéculer sur le fait que la présence de 100 à 200 otages israéliens, binationaux ou étranger aux mains du Hamas pourrait ralentir l’offensive terrestre voire même l’empêcher. Certains évoquent même des négociations, éventuellement menées par des pays tiers (le Qatar, la France…) si Israël s’y refuse. D’autres enfin, expliquent gravement que la seule solution est « l’arrêt de l’escalade militaire » et la relance du « processus de paix ».


Ces propos traduisent une grande méconnaissance de la société israélienne, des doctrines de combat de Tsahal et du Moyen Orient en général. Pour faire court : il n’y aura pas de négociation, et « l’escalade militaire » va continuer et culminer dans une opération terrestre massive et imminente.


Maintenant, développons.


Les réalités régionales et stratégiques


La société israélienne, d’abord : celle-ci peut sembler divisée et elle l’est. Israël est une grande démocratie, où la liberté d’expression est la règle (la seule de la région, répétons-le inlassablement) régie par un mode de scrutin (le vote proportionnel), qui favorise les minorités et exacerbe les débats. Divisé, Israël l’a été encore plus ces derniers mois face à la volonté de Benjamin Netanyahu d’imposer une réforme judiciaire discutable et aux provocations de ministres d’extrême droite (essentiellement Itamar Ben Gvir qui occupe le siège essentiel de la « sécurité nationale ») par ailleurs d’une incompétence crasse. Mais l’histoire a montré à de nombreuses reprises qu’en cas de crise majeure - et celle-ci en est une, la plus grave sans doute que le pays ait jamais connu - elle se ressoudait instantanément, rejetant ses divisions pour faire face. Car c’est une question de survie.


La doctrine militaire israélienne telle qu’elle est appliquée par Tsahal, ensuite. Elle est simple et repose, entre autres sur la « doctrine Dahiya », développée par le général Gadi Eizenkot, Chef d’état-major général de 2015 à 2019 (et par ailleurs ardent défenseur d’une paix à deux Etats, d’un approfondissement de la démocratie et d’une séparation accrue des pouvoirs…).


Dahiya repose sur le concept d'une guerre asymétrique rapide qui implique la destruction des infrastructures civiles des régimes jugés hostiles pour empêcher les combattants ennemis de les utiliser et sur l’utilisation d'une puissance « disproportionnée » pour anéantir les forces adverses. En fait, Dahiya ne fait que synthétiser ce qui a toujours été la doctrine de l’Etat hébreu : maintenir en tous temps et en toutes circonstances une supériorité stratégique et tactique qui assure la survie d’Israël . Tout adversaire potentiel doit savoir qu’il paiera un prix énorme et déraisonnable s’il agresse le pays. Ipso facto, cela signifie que chaque acte hostile doit donner lieu à une réplique immédiate et écrasante. Le but, ici, est de montrer à l’ennemi qu’il ne peut pas espérer gagner.


Enfin le Moyen Orient. Ce n’est ni l’union européenne, ni le Canada ou la Suisse. Le Moyen-Orient est une région cruelle dans laquelle un seul langage est compris : celui de la force.


Ceci posé, examinons les faits.


Le samedi 7 octobre, Israël a été victime d’une attaque massive, sans précédent et d’une sauvagerie inouïe de la part du Hamas. Le bilan, au moment où j’écris ces ligne, est de plus de 1200 morts et de 2500 blessés, mais il s’alourdira certainement encore dans les jours à venir (je n’évoque ici que les pertes israéliennes liées à l’incursion terroriste du Hamas et aux tirs de missiles). Pour donner l’idée exacte des choses, c’est comme si les attentats du 13 Novembre en France avaient…8 520 morts, ou ceux du 11 septembre aux Etats Unis plus de 41 000….


Si ces chiffres ne suffisent pas à faire comprendre l’immense traumatisme de la société israélienne – un traumatisme qui laissera des traces – ajoutons que ces morts sont, en immense majorité, des civils (hommes, femmes, enfants, personnes âgées, des familles entières tirées de leurs lits à six heures du matin et massacrées) et que les victimes ont dubi un déferlement d’atrocités « médiévales » : assassinats à la hache, femmes violées, familles brulées vives, enfants décapités. Et, bien entendu, prises d’otages massives. Parmi ces otages, de nombreux enfants et beaucoup de femmes, destinées, pour l’essentiel, au viol. Bref, comme cela a été dit par d’autres, jamais autant de Juifs n’ont été tués le même jour et dans des conditions aussi ignobles depuis la Shoa.

La réponse israélienne ne peut être que foudroyante et d'une grande "brutalité"


La conjonction des faits tels que je viens de les rappeler et des réalités israéliennes, régionales et doctrinales que j’évoquais plus haut démontre sans contradiction possible que la réponse d’Israël ne peut être que foudroyante et d’une grande brutalité (ce qualificatif n’étant pas un jugement de valeur). Il n’existe aucun autre choix que la destruction du Hamas ou, à tout le moins, un affaiblissement majeur de cette organisation. Au mieux, cette opération permettra à la population gazaouie qui souffre depuis des années de la domination fascisante du Hamas de se débarrasser de lui ; à minima, elle assurera que ces tenants de l’extermination des juifs ne pourront répéter leurs sanglantes opérations de si tôt.


Ceux qui pensent qu’Israël va « négocier » ou même réfréner sa puissance sont de doux rêveurs coupés des réalités. Il n’y a, en réalité, qu’un objectif : éradiquer le Hamas ou lui infliger des pertes sans précédent.


Et il est possible (et souhaitable) de lui infliger de telles pertes, infiniment supérieures (numériquement parlant) à celles qu’Israël a subies (c’est l’aspect « non proportionnel » de la doctrine) : tuer ses chefs (y compris dans des opérations d’élimination ciblées menées par les services spéciaux dans les pays où ils vivent, loin de Gaza), tuer ses commandants et le maximum de ses « combattants », détruire ses stocks d’armements, anéantir ses infrastructures logistiques (entre autres ses tunnels, ses centres de commandement, de renseignement et de communication). Bref, une guerre rapide, mais totale.


Cette guerre passe obligatoirement par une opération terrestre massive. Elle se déclenchera dans les heures et les jours à venir.


De ce point de vue, un signe qui ne trompe pas: Benjamin Netanyahu et le chef de l'opposition Benny Gantz ont annoncé mercredi après-midi la création imminente d'un gouvernement d'union nationale et d'un cabinet de guerre. Dans un pays soumis, je l’ai rappelé, au vote proportionnel et donc par nature par nature instable, c'était une condition politique essentielle au déclenchement d’une guerre terrestre qui entraînera obligatoirement de nouveaux morts israéliens, mais aussi, malheureusement, des victimes collatérales palestiniennes qui seront exploitées par le Hamas pour nuire à l’image de l’Etat juif. Cette opération terrestre pourra débuter à n'importe quel moment quand le nouveau gouvernement sera en place. C’est peut-être une question d’heures.


Et les otages, alors ?


Parlons vrai. Israël ne peut pas se laisser paralyser par les spéculations sur le sort des otages. J’entends des commentateurs rappeler, depuis samedi, le précédent du soldat Gilad Shalit. Shalit avait été enlevé le 25 juin 2006, à la suite d’une incursion terroriste au cours de laquelle deux soldats avaient été tué et deux autres blessés, et gardé en otage pendant plus de cinq ans à Gaza. En octobre 2011, il était libéré contre un millier de prisonniers palestiniens.


Ce qu’oublient ces analystes, c’est qu’il ne s’agissait alors que d’UN otage et que le contexte était très différent. Certes, il y avait eu, au moment de l’enlèvement, deux morts et deux blessés. Mais ici, nous sommes à un minimum de 3500 à 4000 morts et blessés. Par ailleurs, le nombre exact d’otages c’est pas encore connu mais il doit se situer, suivant que l’on se réfère aux chiffres israéliens ou à ceux du Hamas entre 100 et 200 personnes. Connaissant le Hamas (et le Jihad Islamique, qui a participé à l’opération) les négociations, s’il y en avait, dureraient des années, les preneurs d’otages soufflant le chaud et le froid, ce qui achèverait de miner le moral de la société israélienne. Et la présence avérée de ressortissants étrangers parmi ces otages augmenterait encore la pression sur Jérusalem.


Evitons la langue de bois et les promesses qui ne pourront pas être tenues. Je n’ai aucun doute qu’une part significative de l’effort de guerre israélien sera destiné à localiser et à libérer le maximum d’otages possible. Mais, hélas, et cela été répété par des porte-paroles de Tsahal ces dernières heures, si leur vie compte, ils ne sont pas une priorité.


La sécurité de 9,5 millions d’Israéliens, si.

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