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« Meilleurs Alliés » : l’Affrontement entre Churchill et de Gaulle au théâtre


J’avoue que j’étais un peu inquiet : comment rendre compte, en une heure trente, trois actes et sur les planches, de cette relation complexe, tissée d’admiration réciproque, d’orgueil démesuré, de complicité, de tensions multiples, de camaraderie et d’exaspération qui s’installa, entre ces deux géants de 1940 à 1944? Inquiétude d’autant plus vive que ceux qui me connaissent savent que je voue à Winston Churchill une admiration qui confine au fanatisme qui en fait à mes yeux une véritable icône, tout en ayant pour le Général le plus profond respect (même si mon caractère me rend plus sensible au côté humain du premier qu’à la froideur du second). Autant aimer deux hommes qui se sont, parfois, aussi cordialement détestés relève sans doute de la schizophrénie, mais j’assume !

Eh bien, disons le franchement, j’avais tort !

L’action de la pièce se joue sur trois journées (les 5, 6 et 7 juin 1944), soit autour du débarquement en Normandie dont de Gaulle souffrit d’avoir été tenu à l’écart des préparatifs alors que Churchill était pris entre les absurdes (et très injustes) exigences américaines et le sentiment que son hôte français méritait mieux que le second rôle dans lequel Washington ne cessa jamais de vouloir le cantonner. Roosevelt détestait franchement de Gaulle en qui il voyait un dictateur potentiel, et se méfiait de lui, ce qui fut un calvaire pour Churchill qui avait porté son complice français à bout de bras et lui resta loyal.

Evidemment, on peut toujours grogner et chercher la faute, mais je m’en abstiendrai bien volontiers. La belle écriture d’Hervé Bentégeat servie par la mise en scène précise de Jean-Claude Idée (très influencé par le théâtre populaire cher à Jean Vilar) réussit à mettre un texte de qualité et une réalité historique complexe à la portée de tous.

Deux acteurs belges, Pascal Racan (de Gaulle) et Michel de Warzée (Churchill, mais vous l’aviez compris), servis par une (certaine) ressemblance avec les deux géants rendent bien et de manière très humaine ce que fut ce « couple » hors du commun. On sent affleurer dans leur jeu, la folie qui a permis aux deux hommes de penser qu’ils pouvaient, chacun seul contre tous, sauver leur propre pays, s’opposer à Hitler et inverser le cours terrifiant qu’il voulait donner à l’histoire.

Une mention particulière pour Denis Berner qui incarne un Pierre Viénot très touchant (ancien parlementaire, résistant et ambassadeur de la France Libre, Viénot – un Compagnon de la Libération - mourut d’épuisement quelques semaines après le débarquement) et à Laurent d’Olce qui campe un Anthony Eden plus vrai que nature (Eden fut l’un des grands défenseurs de de Gaulle) et plus british que le five o'clock tea.

Bref, un spectacle à aller voir, même en famille : il est accessible à de grands adolescents et les familiarisera avec cette page de la grande histoire écrite par deux des plus importants dirigeants du vingtième siècle. On y passe un excellent moment, fait de rires et d'émotion et l'on en sort avec quelques sujets de réflexions mais aussi l'envie de rouvrir l'un ou l'autre livre.

Meilleurs alliés se joue à Paris, au Petit Montparnasse jusqu’au 30 décembre 2017 (location : 01 43 22 77 74) et sera à l’affiche de la Comédie Claude Volter, à Bruxelles, du 17 janvier au 11 février 2018 (location : 02 762 09 63).

Le texte d’Hervé Bentégeat a été édité aux Editions Rabelais

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